Embarquons pour un petit voyage historique, léger, sans jargon, pour placer ce trouble sexuel dans le temps long et vous aider à reprendre confiance.
Antiquité et mondes classiques : le temps, la maîtrise, le rythme
Dans les cultures grecques et romaines, la bonne conduite du rapport s’évaluait autant à la « tempérance » (la modération) qu’au plaisir partagé. Les auteurs antiques distinguaient déjà des phases d’excitation et constataient le point de non-retour : franchi ce seuil, l’orgasme masculin devient inévitable.
En Inde, le Kamasutra évoque les arts du rythme et des positions pour allonger la durée ; en Chine, les arts taoïstes de la chambre et le Su Nü Jing recommandaient de différer l’éjaculation, de « respirer » le mouvement et d’ajuster la stimulation pour retenir son éjaculation et prolonger l’union. Ces textes n’emploient pas les mêmes mots que nous, mais l’intuition est aussi claire que l’intention : il faut contrôler l’excitation sexuelle, jouer sur la sensation, ménager des pauses.
Médecins du monde islamique & savants médiévaux : soigner avant tout
Du Xᵉ au XIIe siècle, des médecins comme Râzî, Jorjânî ou Avicenne prônent une approche graduée : conseil diététique, remèdes simples, observation du comportement, priorité à l’hygiène de vie. Ils décrivent des variations de durée des rapports et des difficultés d’éjaculation (trop vite ou trop tardive), et visent à réduire l’excitation excessive sans nuire au plaisir. Là encore, un objectif : améliorer la santé sexuelle dans son ensemble, pas seulement « tenir ».
La sexualité est associée à une forme de sagesse et c'est une leçon que nous devons conserver à l'esprit. Au fond, le plaisir est une chose extrêmement sérieuse.
XVIIIe-XIXe siècles : angoisses morales, « onanisme », neurasthénie
Grand virage avec l’Europe des Lumières et l’ère victorienne qui commencent à médicaliser le sexe. Le Suisse Samuel Auguste Tissot popularise cette idée que « gaspiller » le sperme affaiblit l’homme et entraîne mille maux. Clairement, c'est un miroir de son époque plus qu’un traité scientifique...
Dans le même ordre d'idées, la notion de neurasthénie devient au XIXe siècle un diagnostic fourre-tout. Les médecins y rangent la fatigue, l'anxiété, les « nerfs »… mais aussi les difficultés d’éjaculation ou d’érection. Un pas vers l'homme moderne qui découvre, avec dépit, la pression de performance, la tension morale et son cercle vicieux : plus on a peur d’éjaculer « trop vite », plus on atteint plus rapidement ce point critique. Déjà, oui…
XXe siècle : de la clinique à la méthode (stop and start, squeeze...)
Au milieu du XXe siècle, une sexologie véritablement scientifique voit le jour. 1956 : James H. Semans formalise la méthode stop and start : on stimule, on s’arrête juste avant l’éjaculation, on relâche la pression, et puis on repart. L'idée, c'est de répéter et d'apprendre progressivement à gérer le réflexe éjaculatoire.
Quelques années plus tard, Masters & Johnson popularisent la fameuse technique du squeeze, cette compression brève près du gland pour « casser l’élan ». Ces techniques comportementales changent le paysage : on parle d’apprendre la maîtrise, d’allonger la durée, on met en avant le contrôle partagé avec la partenaire. Elles inspireront les thérapies modernes, du coaching à l’hypnose et à la sexologie.
Aujourd’hui : définir, dédramatiser, personnaliser
Les sociétés savantes (ISSM/EAU/AUA) posent un cadre : on parle d’éjaculation précoce quand l’éjaculation survient toujours ou presque dans environ 1 minute après la pénétration, avec sentiment de perte de contrôle et détresse — on distingue l’éjaculation précoce primaire (dès le début de la vie sexuelle) et secondaire (après une période « normale »). La prise en charge combine techniques, exercices, produits locaux et, si besoin, traitement médicamenteux. La boussole reste la vie sexuelle globale : communication dans le couple, plaisir, consentement, confiance en soi.
Petit musée des idées pour retarder l'éjaculation aujourd’hui
1) L’art des pauses : stop and start
Héritier des pratiques antiques et de Semans, le start-stop consiste à jouer avec la stimulation : vous approchez du point de non-retour ? Stop. Respiration profonde, baisse de tension, puis Start. À deux, c’est encore mieux : votre partenaire vous aide à « chorégraphier » le mouvement, ce qui améliore considérablement la confiance et la communication. On ajoute que c'est une pratique ludique qui peut sans difficulté être intégrée aux jeux sexuels. L'imagination est votre amie, toujours !
2) Les exercices du plancher pelvien : Kegel
Pratiqués depuis des décennies, les exercices de Kegel renforcent les muscles du périnée et aident à moduler la pression interne. Beaucoup d’hommes témoignent d’un meilleur contrôle et d’une durée de rapports sexuels plus confortable. Vous pouvez pratiquer 5 minutes par jour. La régularité est votre amie, toujours !
3) Diminuer la sensibilité (avec mesure)
Les solutions modernes reprennent une vieille intuition : jouer sur la sensibilité du gland et de la verge. Préservatif un peu plus épais, spray retardant, crème anesthésiante à base de lidocaïne (anesthésique local) — à utiliser parcimonieusement, quelques minutes avant la pénétration, pour réduire la sensation sans annuler le plaisir (ni celui du/de la partenaire). Les recommandations cliniques y voient un outil utile quand il est bien dosé.
D’esprit « naturelle » et douce, certaines options peuvent accompagner l’entraînement sans « couper » les sensations : une huile apaisante pour l’anxiété de performance (ex. Huile CBD Optima 20) et le gel retardant Evo ou le lubrifiant Hydrox pour mieux gérer la stimulation et allonger la durée. L’idée n’est pas de masquer : c’est d’aider à sortir du cercle vicieux et à retrouver le retour de la confiance.
4) Thérapie et traitement : quand la science complète la pratique
La thérapie comportementale (parfois avec le recours de l'hypnose) aide à casser l’anticipation anxieuse et à structurer des essais (exercices, positions, pauses). Côté médicament : certains ISRS (« inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ») comme la Dapoxétine (Priligy) aident certains profils à retarder l’éjaculation. C’est un traitement sur prescription, adapté au niveau individuel, que l’on réévalue avec un médecin ou un sexologue si les symptômes persistent.
Conclusion
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L’éjaculation précoce ou rapide n’est pas un verdict moral ; c’est un trouble fréquent. Il existe d’ailleurs aussi des éjaculations tardives, et même une éjaculation rétrograde (problème rarissime et très différent).
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Ce que vous vivez signifie surtout qu’il faut du temps pour apprendre votre corps. Par exemple, quelques préliminaires de plus, une position où vous gardez le contrôle, une pause stop-start, une respiration plus lente.
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La masturbation préalable peut, selon la personne, diminuer l’emballement initial ; chez d’autres, non.
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Si d’autres facteurs existent (douleurs, dysfonction érectile, hormonaux, produits en utilisation), mieux vaut consulter.
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La communication dans le couple n’est pas un « plus » : c’est le cœur de la solution. Elle joue un rôle sur la confiance sexuelle et la qualité des rapports.
D’hier à aujourd’hui, on retrouve la même logique :
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Observer les causes (physiques, psychologiques, contextuelles),
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Créer des marges de manœuvre (techniques simples, exercices, respiration, relaxation),
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Mobiliser, si nécessaire, une prise en charge médicale graduée (avec médicaments uniquement lorsque c’est recommandé),
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Protéger la communication et la confiance dans le couple, pour une sexualité épanouie.
Le but ? Allonger la durée des rapports quand on le souhaite, mais surtout libérer la charge mentale, briser le cercle vicieux, retrouver le plaisir partagé. L’éjaculation masculine fait partie de la vie et votre histoire rejoint une très longue histoire. Prenez le temps : c’est lui, depuis toujours, le meilleur allié.